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L’exploitation de la forêt au Bénin
La petite histoire de l’homme qui casse la branche sur laquelle il est assis
![]() Cela ressemble fort bien à cette histoire du berger peuhl qui grimpé à un arbre pour échapper au lion, décide comme le lion s’est couché au pied de l’arbre, de s’armer d’un gourdin pour se défendre en cassant la branche sur laquelle il est assis… Chacun peut aisément imaginé une fin à cette histoire.
Après ce petit exercice qui a eu le mérite de fait sourire, sachez hélas que nous vivons justement et en ce moment même cette allégorie. Et pour cause, le Bénin est entrain de freiner son propre développement en regardant se détruire chaque jour sa forêt et partant, son potentiel agricole en faisant semblant d’ignorer cette nouvelle mafia que constitue l’exploitation abusive et frauduleuse du bois destiné non plus à la chauffe ou à l’artisanat mais à l’exportation.
Et pourtant nous ne sommes pas aussi verts que cela!
Le Bénin a une couverture végétale mineure d’environ 40%, mais la majorité des terres restantes sont moins boisées. La végétation a été sérieusement diminuée par les activités d’exploitations néfastes et de grandes surfaces de forêts de haute futaie ont été défrichées. La forêt dense restante est principalement concentrée dans le sud-est du pays, près de Kétou. Les essences les plus répandues sont : l’Iroko et son voisin l’antiaris africana le faux iroko, le Samba et le kosso. La majorité du territoire est occupée par la savane qui est selon le cas issue de la régénération des forêts défrichées ou constituée de boisements naturels de types soudaniens
Le Bénin a un modeste domaine de plantation forestière principalement composé de Tecks. Et un peu plus de 2% de la superficie totale des terres est protégée dans deux parcs nationaux et trois zones cynégétiques. Selon une étude topographique menée en 2005, la couverture forestière est de 2 650 000 ha. Avec une perte annuelle de 70 000 Ha, le Bénin enregistre les plus forts taux d’exploitation des forêts au monde.
Ainsi ce Bénin qui semble afficher une auto suffisance en sciage, bois énergie, en poteaux et en perches est menacé en réalité de raréfaction de sa couverture végétale naturelle et est déjà sur la liste des pays candidats à la désertification pour les décennies à venir.
L’éternel problème du droit coutumier et de la propriété foncière
Au départ, toutes les forêts étaient gérées par les chefs traditionnels. Pendant la période coloniale, une bonne partie de ces forêts a été classée. Les droits d’usage reconnus aux populations riveraines étaient surtout limités au ramassage du bois mort et à la cueillette des fruits.
Les mesures de protection strictes dont ces forêts ont bénéficié au début de leur classement (1940-
1950) se sont progressivement émoussées avec le temps pour diverses raisons dont surtout la faiblesse des moyens humains et matériels de l’administration forestière.
Ces forêts n’ont jamais été l’objet d’aucune gestion rationnelle. Elles sont constamment soumises aux actions anthropiques néfastes telles que les feux de brousse incontrôlés, l’exploitation illégale du bois et la culture itinérante sur brûlis. Aujourd’hui, ces forêts sont dans un état de dégradation avancée mettant ainsi en péril la stabilité des écosystèmes et favorisant la désertification du pays. La situation du droit foncier au Bénin est caractérisée par la coexistence du régime traditionnel et du régime moderne ou écrit.
Les règles et pratiques locales souvent inadéquates ont entraîné des comportements de concurrence appropriation qui ont accéléré la dégradation des terres et des autres ressources naturelles.
Le fait que la majeure partie des terres rurales soit encore sous l'influence du régime foncier coutumier n'arrange pas mieux les choses, puisqu'il explique le nombre impressionnant des conflits domaniaux.
La non application de la législation forestière mise en place depuis lors, favorise la déforestation rapide et anarchique. Or la déforestation à travers le monde a des conséquences catastrophiques en terme de perte de biodiversité, de changement climatique, de perturbation du cycle de l’eau, et de perte de vie pour les communautés riveraines des forêts. Les meilleures estimations mondiales font état de 86 Millions d’hectares perdus entre 1990 et 2005 dont les 70 000 annuellement pour le Bénin.
Le taux actuel de déforestation renseigne clairement sur l’écosystème terrestre : il menace le rôle de la forêt comme principal réservoir de la diversité biologique et de séquestration de carbone, il influe quotidiennement la vie de centaines de millions de personne à travers le monde et a de profondes conséquences sur l’avenir de la planète.
Le laxisme des autorités et la naissance d’une mafia du bois
Selon le rapport de l’audit institutionnel réalisé en 2004, le secteur forestier serait actuellement confronté aux problèmes suivants : un cadre institutionnel inadéquat, une faible implication des populations dans la gestion des ressources naturelles, une mauvaise gestion des ressources forestières, une mauvaise gestion des ressources de la faune et de son habitat.
La corruption est la plus pernicieuse et la plus profonde cause de la dégradation des forêts. La
Corruption dans le secteur forestier a plusieurs manifestions : coupe illégale de bois, fraude dans
L’exploitation forestière et falsification de taxe. Ces formes de corruption sont le reflet du manque de comptabilité et de transparence des entreprises d’exploitation forestières, du gouvernement et d’autres acteurs du secteur forestier. La documentation de ces pratiques rétrogrades se trouve confronter à une faible disponibilité de données et à des difficultés méthodologiques. Chercheurs, réformateurs à tous les niveaux national et international, officiel ou non gouvernemental, public et privé voient leurs efforts de freiner la corruption inhiber par le manque de méthodologie commune, d’outils d’analyse appropriés, et d’action concertée. La corruption rend la gestion forestière inefficace et plusieurs dispositions et mécanismes de contrôle non efficients
A titre d’exemple, comme le souligne ici une ONG de protection de l’environnement, L’iroko peut être exploité en payant les taxes allant de 6000F CFA à 54.000F pour les arbres dont les
Circonférences prises à 1,30 m du sol mesurent au moins 3 mètres et la hauteur moins de 6m. Mais le Même texte précise que l’arbre ne pourra faire l’objet d’un permis de coupe que si la circonférence prise à 1,30 m du sol mesure au moins 3 mètres. Et c’est justement à ce niveau que les exploitants forestiers ne respectent pas la réglementation. Tous les iroko rencontrés sur leur passage sont détruits. Certains arbres donnent à peine 3 ou 4 madriers de 2 mètres de long dans un sciage effectué à la hâte à l’aide d’une tronçonneuse, un engin pourtant prohibé dans l’exploitation forestière au Bénin depuis 1982.
Cette ONG qui semble d’ailleurs bien au fait des pratiques illégales dans le domaine soulève même un autre problème. Selon elle, L’exploitation forestière au Bénin est toujours menée avec la tronçonneuse, le plus déplorable continue t elle, c’est que cet appareil est utilisé avec la complicité des agents chargés du contrôle. En conséquence, sur 4073,244 m3 de bois, à peine les 40%, soit 1.629,298 m3 sont obtenus en madriers exploitables. Le volume d’un madrier normal de 4 m étant de 0,096 m3, nous n’avons obtenu que 16.972 madriers en 7 ans et perdu sur le terrain un volume de 2.444 m3 à la merci du feu. Voilà comment l’iroko disparaît progressivement au Bénin conclut elle.
Appel à une mobilisation nationale pour la forêt Si la population ne s’est pas senti impliqué dans la lutte contre l’érosion côtière du fait que le cas était plus du ressort des experts et technicien de lutte contre l’érosion, la situation semble bien différente du problème de la déforestation. Chaque béninois peut s’impliquer en commençant par une sensibilisation du monde rural et en dénonçant les déchargements ou chargements nocturnes de containers de madrier qui prennent pour la plupart le large pour la chine.
Déjà des organismes comme le système des Nations Unies à travers l’ITTO, la Banque Mondiale et la FAO ou des ONG mondiales comme le WWF et l’UICN suivies par Greenpeace pour une meilleure orientation de la recherche, comme IIED et WRI ou encore pour une meilleure orientation des marchés comme WBCSD et FSC se mobilisent pour nous aider. Encourageons donc l’éducation d’un nouveau type de comportement à même de nous aider à gagner le combat contre la désertification. Arrêtons donc aujourd’hui de scier la branche où nous sommes assis. . Le Bénin a d’ailleurs suivi avec intérêt ce processus depuis Brazzaville jusqu’à Yaoundé où s’est tenue la conférence ministérielle en Octobre 2003.
Damien HOUESSOU |
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